Critique – La Jeune fille sans mains


Après une présence remarquée au dernier festival d’Annecy, La jeune fille sans mains, réalisé par Sébastien Laudenbach, récolte sur son passage le prix du meilleur film au festival Anim’est de Bucarest et le Grand Prix au festival international du film d’animation de Bucheon en Corée du Sud. Mais ce long-métrage, qui a reçu une mention du Jury au Festival International du film d’animation d’Annecy, mérite-il tous ces honneurs ?

[message]En des temps difficiles, un meunier vend sa fille au Diable. Protégée par sa pureté, elle lui échappe mais est privée de ses mains. Cheminant loin de sa famille, elle rencontre la déesse de l’eau, un doux jardinier et le prince en son château. Un long périple vers la lumière…[/message]
Inspiré d’un conte de Grimm, l’intrigue prend place dans un moyen âge où la famine torture le père de la jeune fille. Cette situation est le terreau idéal pour que le Diable en tire profit en réclamant tout d’abord la jeune fille, puis dans un instant de clémence, seulement ses mains. On s’imprègne facilement de cette matière sombre et organique liée au conte, cet antagoniste religieux apparaît de manière régulière en maintenant l’enjeu au centre de la narration. A l’opposé, les aspects positifs de l’aventure de l’héroïne sont en lien avec la Nature relevant à la fois de l’animisme et d’un côté païen. On les découvre par le biais de différents indices (le pommier, la rivière,…) apportant ainsi de l’espoir dans les moments désespérés. Le récit atteint alors un équilibre au travers duquel on ne s’ennuie pas ! Le personnage de la jeune fille, justement vocalisé par Anaïs Demoustier, se dévoile comme étant à la fois fort, déterminé et aussi très sensible. Elle est de plus servie par une animation vivace et mobile, ce qui lui fait instinctivement prendre corps dans l’esprit du spectateur. Au sujet des autres protagonistes, on peut être surpris par l’interprétation assez juvénile du père, même si celle-ci prend sens au fil des ultimatum posés par le Diable. Au fil de l’histoire, chaque intervention de personnage se place finement construisant, autour de la jeune fille un univers riche et prenant. L’univers présenté se révèle par une esthétique peinte évoquant la vibrance de couleurs fauvistes et d’un trait encré digne des plus belles estampes. Ce jeu de couleurs appelle une forme de synesthésie et apporte ainsi un sens naturel aux images, où la corporalité et les mouvements des personnages se déploient avec force et densité grâce à la finesse du travail sonore de Julien Ngo Trong, Romain Anklewicz et Xavier Marsais. On assiste aussi à des moments emprunts de poésie où la peinture luminescente sublime une nature majestueuse et sauvage. Ces choix esthétiques font de La jeune fille sans mains un objet curieux et totalement abordable, et on comprend alors aisément ce qui a touché le public des différents festivals d’animation. En effet, il n’est pas nécessaire d’avoir fait des études poussées en arts pour découvrir et comprendre en famille.a portée de cette histoire. N’ayant aucune attente avant ma séance, La jeune fille sans mains m’a totalement prise au dépourvu et complètement conquise par l’efficacité de son histoire, ses couleurs changeantes et flamboyantes, et pour terminer sa fin pleine de modernité. Le film, distribué par Shellac, a une sortie prévue dans nos salles le 14 décembre prochain. Alors si vous avez envie de faire découvrir les saveurs d’un conte de Grimm à vos enfants, emmenez-les voir La jeune fille sans mains avant de déballer les cadeaux et de goûter à la bûche de Noël. C’est un film à soutenir, vraiment !

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