Sortie le 4 décembre via Malavida, la nouvelle compilation de courts métrages de Youri Norstein permet de revenir une fois de plus sur la filmographie de l’artiste russe après la sortie en vidéo de la précédente, Le Petit Hérisson dans la brume.
La Bataille de Kerjenets
Après un adieu déchirant à leur femme et leur cité, des soldats partent mener une guerre meurtrière et brutale contre les Tatares. Norstein anime des icônes sur un opéra de Rimski-Korsakov. Stupéfiant.
Réalisé par Youri Norstein et Ivan Ivanov-Vano, la Bataille de Kerjenets offre une reconstitution en papier découpé impressionnante dans la multiplicité des armées russes et tartares. On peut rapprocher ce procédé de l’animation de la tapisserie de Bayeux réalisé en 2009 par Potion Pictures en exemple le plus récent. La délicatesse des traits des icônes apportent une autre dimension à ce récit épique. On se laisse aisément happé par ce segment.
Le Héron et la Cigogne
La Cigogne et son voisin le Héron peinent à exprimer leurs sentiments. Aveuglés par leur orgueil, ils se tournent autour sans pouvoir s’avouer leur amour. Marivaux voisine ici avec l’âme russe. Léger et grave,
nostalgique mais drôlissime.
Ce court de 1974 d’une dizaine de minutes de Youri Norstein développe une parade amoureuse volatile entre un héron pauvre et une cigogne huppée. Malgré son histoire « fuis moi, je te suis » pour le moins conventionnelle, ce segment est notable dans l’élégance et la finesse des silhouettes des oiseaux, aussi dans la mise en place de décors romantiques digne de Jane Austen.
Le Conte des Contes
Dans un collage de souvenirs qui s’entremêlent, Youri Norstein nous plonge dans des images enfouies de son enfance, guidé par la douce figure du Petit Loup gris sorti d’une comptine très populaire en Russie.
Dans ce court de 29 minutes, le réalisateur nous propose de plonger dans ses souvenirs de vie par le biais du personnage du Petit Loup Gris. Les souvenirs traversés peuvent être aussi doux que la prime enfance, et aussi durs et abrupts que la guerre. Il s’en dégage une trame aussi aléatoire et chaotique que la vie elle-même. Cette proposition atypique m’a plongé dans une émotion à la fois triste, nostalgique très prégnante longtemps après la découverte du Conte des contes. En cette période particulière de l’année, cette sensation est plutôt fort à propos.
Le Petit Hérisson dans la brume
Parti rejoindre son ami l’ours pour leur traditionnel thé sous les étoiles, le petit hérisson se retrouve perdu dans un épais brouillard, où les silhouettes, même anodines, deviennent inquiétantes.
J’ai déjà évoqué ce magnifique court-métrage lors de la sortie DVD éponyme que je vous vous remets ici : Le Petit hérisson dans la brume est un film d’une puissance évocatrice rare, et les méthodes d’animation utilisées impressionnent toujours aujourd’hui, que ce soit les mouvements des personnages en papier découpé, l’utilisation de la brume et sa densité dans les liens que traversent notre petit hérisson… Il y a quelque chose d’onirique et d’inspirant dans cette mise en scène, une ambiance difficile à saisir qui provoque une fascination durable. Un court métrage à découvrir de toute urgence !
