En 2009, Reki Kawahara publie le début d’un light novel au Japon sur l’immersion virtuelle mais mortelle d’un jeune adolescent sur une nouvelle plate-forme en ligne : Sword Art Online. En 2012, fort de son succès, le récit est animé et présenté par le studio A-1 Pictures (Fairy Tail, Blue Exorcist, Fractale) produit et distribué par Aniplex, en France c’est Wakanim qui le diffuse à l’écran.
Cette saga phénomène connaît aujourd’hui – en plus de ses lights novels – trois saisons (et une série parallèle) d’animés toujours en cours, des mangas sur les trames principales et parallèles de l’histoire, des jeux vidéo, un long-métrage… Reki Kawahara nous a démontré depuis plus de dix années son attachement à la thématique paradoxale de la réalité virtuelle (son autre manga Accel World traite d’une autre plate-forme de jeu où certaines personnes vivent une réa-virtualité accélérée…) et de notre perception cognitive et émotionnelle comme garant de notre humanité, où qu’elle soit générée.
Cet article est l’occasion pour moi de retracer la chronologie des épisodes, les intrigues de la saga et de vous en vanter les mérites, ainsi que les faiblesses… Link-Start !
Saison 1 – Sword Art Online
En 2022, la révolution video-ludique atteint son paroxysme avec le tout premier jeu en ligne immersif, Sword Art Online. Mais avant même d’avoir pu commencer à découvrir le jeu, tous les joueurs sont soudainement confrontés à une terrible réalité : il ne leur est plus possible de se déconnecter. La mort de son personnage entraîne la même conséquence dans la réalité. Plus d’autres choix possibles, il faut progresser et terminer le jeu pour espérer retrouver le monde réel.
Arc I – Aincrad
L’Aincrad est un monde flottant au milieu de nulle part, possédant 100 paliers. Chaque palier est un territoire en soi, avec ses donjons et ses boss. Kayaba Akihiko est le créateur de ce monde et de Sword Art Online. Ce jeu est pour lui une expérience sociologique où le virtuel, pris au sérieux, doit dévoiler davantage de l’esprit humain. Lors de la mise en route du système, 10 000 joueurs se connectent et découvre la fatalité cruelle de ce qui n’est désormais plus du tout un jeu. Beaucoup d’entre eux, paralysés par l’effroyable dilemme « avancer et mourir ou rester coincé et survivre… », forment la ville de Départ du Palier 1 : Refuge pour les joueurs qui ne peuvent se résoudre à prendre le risque. Kirito est un jeune joueur japonais, féru de technologie et de jeu en ligne. Il est le personnage principal, digne de tous les animés japonais. Il réussit tout sans jamais se justifier, ni échouer. Son chara-design est classique, voire traditionnel. Il engage l’ascension de l’Aincrad, avec la volonté de sauver l’ensemble des joueurs. Il se proclame bouc-émissaire, par là-même devient un joueur solo et fait de son talent un vecteur de motivation pour les autres joueurs.
Il s’oppose clairement à Asuna, le deuxième personnage principal, qui est une novice dans les jeux en ligne (son pseudo est d’ailleurs son réel prénom, Asuna Yûki, ce qui ne se fait quasi-jamais, mais qui représente sa volonté honnête et sincère de participer dans cet autre monde, cherchant à la base à fuir le sien). Elle souhaite s’intégrer une autre norme, une équipe où elle se sentirait acceptée et mise en valeur. Ses deux forces divergentes sont un moyen d’illustrer deux types de joueurs. Le solo face à l’équipe. La rigueur face à la pédagogie. Se retrouvant dans leur exigence et leur sérieux, ils deviennent très vite le duo puis le couple de l’histoire.
Cet Arc 1 est la fondation de leur relation, comme exemple de la véracité d’une vie dans un milieu virtuel. Les joueurs restent enfermés 2 ans sur la plate-forme, et finissent même par se retirer des combats pour vivre un temps, soit peu, leur histoire d’amour. Même si c’est au sein d’un jeu mortel, le couple décide de vivre pleinement son émotion. Kirito explique à Asuna que cette existence ici est tout aussi valide que leur « vraie » vie à l’extérieur. C’est une idée fondamentale pour la saga SAO, de relier conjointement ces deux mondes. Jusqu’à l’avènement de Yui, intelligence artificielle qui deviendra leur « enfant », l’éduquant et la berçant d’émotions… [SPOILERS] Et que dire de la fin de l’arc, lors du sacrifice d’Asuna face à Heathcliff (boss surprise du 75e palier, nul autre que Kayaba Akihiko) la peine de Kirito, et sa mort, ne sont-elles pas aussi réelles ?
Aincrad est l’essence même de l’univers Sword Art Online, avec ses enjeux mortels, ses injustices perverses, ses organisations sociétales, ses histoires d’amour et ses interrogations sur une vie virtuelle comme existence légitime dans la réalité. L’Arc 1 est le plus engageant, et le plus intense (de par sa radicalité et sa pression fatale) sur seulement 14 épisodes.
Arc II – Alfheim – Fairy Dance
Cet arc vient conclure la première saison et l’affaire Sword Art Online. L’enjeu est relativement classique… Sauver la princesse. En effet, plus de 300 joueurs ne se sont pas réveillés après que Kirito ait vaincu HeathCliff, le personnage de Kayaba Akihiko, dont Asuna. Kazuto Kirigaya (Kirito) entend parler d’un palier infranchissable sur un nouveau jeu en ligne, Alfheim. On lui passe la capture d’écran d’une ombre fugace enfermée dans une cage d’oiseau, il est formel, c’est Asuna. Kirito plonge à nouveau grâce à un nouveau système Full-Dive. Cette fois, son Nerve-Gear est sécurisé, il peut se déconnecter du jeu. L’aventure commence avec d’autant plus de plaisir mais pas moins de détermination.
Il rencontre une Sylphe guerrière du nom de Leafa, qui se prend d’amitié pour cet étrange personnage et décide de l’aider dans sa quête. Il s’agit en réalité de sa cousine Sugu Kirgaya, qui joue dans la chambre d’à côté. Le traitement de la double vie dans la série SAO n’est pas nouveau. Mais Sugu revendique clairement la séparation de ces deux mondes, là où pour Kirito comme pour Asuna, il n’y a aucune différence. Ni dans la manière de traiter le monde, ni dans la façon de le ressentir. Après tout, leur fille Yui y vit, et Asuna est réellement enfermée dans son corps, à nouveau dans un jeu vidéo.
Le récit crée de la nuance et amplifie la réflexion de son intrigue, surtout en ce qui concerne l’illustration du pouvoir d’un joueur sur ses personnages. Kayaba Akihiko, en créant ce monde ne donnent que des motivations assez mystérieuses, quasi-transcendantales sur la place du joueur et la réalité de ses émotions, là où l’antagoniste Nobuyuki (membre de la société fondatrice de SAO) maintient des joueurs dans le sommeil pour sa satisfaction scientifique et perverse. Il étudie leur cerveau et leur perception en leur faisant vivre un cauchemar, il y prend même plaisir, et s’amuse du corps d’Asuna. Le fait même que la jauge de douleur n’apparaisse que dans cet arc, corrobore le sadisme de ce nouvel ennemi. Et les enjeux personnels d’un combat entre Kirito et l’univers du jeu en ligne.
Sword Art Online (SAO pour les intimes) ouvre la porte, autant qu’il fait partie de tous les univers du genre SF que nous aimons introduire par l’ironique « Oh non ! Je suis coincé.e dans un RPG ! » (Sans rancune, Matrix, et merci pour cette expression L’Ermite Moderne !). Cette première saison connaît une intrigue et une trame principale qui aurait pu se suffire à elle-même. Celle de la lutte pour son identité, de la quête de vérité. Où le divertissement cherche à vous tuer, et par là-même prouve sa tangibilité et crédibilité au sein de l’existence.
Saison 2 – Gun Gale Online
Un an après l’affaire Sword Art Online, Kazuto Kirigaya est appelé par un fonctionnaire du ministère des Affaires Générales, section mondes virtuels. Il lui apprend que des événements étranges ont lieu sur la plate-forme de GGO, Gun Gale Online, le seul VRMMO où officient des professionnels. Deux joueurs ont été retrouvés morts dans des circonstances mystérieuses, après avoir été abattus dans le jeu par un personnage nommé « Death Gun ».
Arc I – Phantom Bullet
Avec GGO, la série sort de son univers familier de la fantasy médiévale pour proposer celui désertique et brute des armes à feux, rappelant la gamme des jeux FPS et commando. Un autre type d’environnement pour un autre type de jeu, et donc de joueurs. La pirouette narrative permettant à l’épéiste noir de conserver son arme de prédilection m’avait légèrement fait tiquer (ce personnage a décidément tous les passe-droits).
À chaque arc, son personnage féminin. Ici, il s’agit de Sinon (Shino Asada), une jeune otaku au passé hanté par une violence qui la paralyse. Mais dans GGO, elle est l’implacable et redoutable Sinon, sniper professionnelle armée d’Hécate (toute bonne arme à un nom…) qui possède une maîtrise et un sang-froid qui la rassure. Après de petites péripéties puériles (on peut « sourire » quelques instants du travestissement de Kirito car au final, c’est anecdotique et ne change rien à ses prouesses), elle va se lier à lui et mène l’enquête sur ses assassinats qui laissent croire à un retour de la connexion mortelle, et mettent à mal la sécurité des joueurs, et donc la sienne.
L’intérêt de cet arc est surtout narratif. Les Laughin Coffin semblent ne plus simplement être un groupe de tueurs isolés et pervers découverts dans Sword Art Online. C’est une organisation aussi réelle que virtuelle et les meurtres ne deviennent plus un symptôme d’un jeu castrateur, ils sont la cause d’une idéologie dévastatrice. Le drame dans l’enfance de Shino Asada permet également d’intensifier son personnage, de densifier ses motivations… même si au final, cela permet une fois encore de placer Kirito en sauveur, plutôt que Sinon en résilience.
Calibur – OAV Bonus
Il s’agit d’un épisode parallèle à la trame principale qui a pour unique enjeu de nous démontrer le lien qui unit le groupe à l’intérieur du jeu vidéo. Là où l’épisode à la plage sert de pause à l’intrigue et de récréation teintée de fan service, cet épisode met en scène un événement incontournable du MMORPG : Le raid d’un donjon. C’est aussi l’occasion de montrer que les bases scénaristiques des jeux vidéo ont des influences diverses. Dans Alfheim, plutôt un univers shakespearien avec Obéron et Titania. Ici, les légendes vikings et celtes. C’est l’épisode de la cohésion et de l’amitié.
Arc II- Mother’s Rosario
Enfin un arc consacré à Asuna ! Ou presque. Disons plutôt que c’est enfin par Asuna que nous traversons un autre monde (même si je vous l’accorde… le passage du tout début avec le soutien silencieux et « complice » de Kirito se teinte d’un paternalisme agaçant) et une autre guilde ! Un épéiste sur Alfheim défie tous les joueurs à un duel, il promet de faire don de sa technique spéciale s’il est vaincu. Kirito et Leafa ont déjà tenté le coup, sans succès. Nous voici donc avec Asuna, dans sa nouvelle peau d’ondine d’Alfheim qui rencontre quelques nouveaux joueurs, dont une joueuse talentueuse, Yûki.
Le lien est vite tracé entre leur nom commun (pour rappel Asuna se nomme Asuna Yûki, et la joueuse Yûki Konno) et leurs prouesses à l’épée (« L’éclair de la rapière » pour Asuna, « L’épée absolue » pour Yûki). La guilde des « Sleeping Knights » est composée de joueurs avec une particularité tragique : ils sont tous hospitalisés et décide de former une amitié sans pression sociale. Ils ont pour but de finir le 27e palier et ainsi rejoindre pour toujours la liste des vainqueurs sur le mur des scores. Pendant ce temps, dans la vie réelle (on ne sait plus comment nommer notre réalité maintenant, hein ?), Asuna et sa mère sont en conflit quant à son avenir. Fille d’une très bonne famille, Asuna est sensé poursuivre un cursus « digne » de son rang et de trouver un partenaire dont le statut social pourrait rassurer sa mère. La redoutable ancienne capitaine de SAO a bien du mal à tenir tête à ces injonctions, et c’est surtout l’incompréhension qui semble lier la mère et sa fille… Asuna trouvera la force dans le récit personnel de Yuki et dans le jeu de convaincre sa mère de l’écouter, notamment au moyen du Full Dive, rétablissant ainsi un lien d’écoute et de confiance.
Cet arc fait du bien à la série, pas seulement parce qu’il est tragique : la maladie de Yuki et son désir de laisser une trace dans le seul monde qui l’importe vous brise littéralement le cœur. Pas seulement parce qu’il est montré la puissance de la communication lorsque les arguments de la réalité sont effacés au profit d’enjeu que l’on s’impose et se choisit. Mais surtout parce qu’il nous permet de créer enfin un lien plus fort avec la personnalité d’Asuna, de comprendre son implication lors de ses années de captivité au sein de SAO, de s’identifier à ses émotions et ses choix face à sa fille Yui… Il n’est question que de femme dans cet arc, et cela fait du bien. De leurs injonctions, et de leurs combats perpétuels contre la stigmatisation et mettre en avant leurs valeurs comme leurs rêves. L’idée d’une existence seulement validée dans le virtuel, seulement vécue par l’ensemble de ses moyens – même virtuels – devient de plus en plus insistante et philosophique.
Ordinal Scale, le film
En l’an 2026, deux ans après avoir été libérés de Sword Art Online, Kazuto et ses amis survivants profitent enfin de jours paisibles. Récemment, la réalité augmentée est devenue possible grâce à l’Augma, et avec cette mode vient son lot de modifications du quotidien. Un nouveau jeu émerge, nommé « Ordinal Scale », et devient rapidement si populaire que la réalité virtuelle s’en trouve délaissée. Kazuto, de nature peu athlétique, ne semble pas motivé par la réalité augmentée, mais c’est alors que d’anciens boss de S.A.O font leur apparition… Et d’autres fantômes du passé menacent de resurgir…
Ce long-métrage fait monter la saga à un niveau plus esthétique, plus technique. L’animation a radicalement progressé en fluidité, en lumière, en densité. Elle nous interroge sur une actualité plus prenante que les scenari précédents, il ne s’agit pas de réalité virtuelle mais de réalité augmentée.
Ce n’est plus les joueurs qui sont en immersion, c’est le monde numérique qui s’invite dans votre existence. Et cela interroge encore davantage la place des I.A. : Yuna, qui n’est pas sans rappeler notre Hatsune Miku, la chanteuse pop japonaise entièrement numérique, l’utilisation du vocaloid, , la corruption des données réelles-virtuelles mais aussi le droit à l’oubli qu’occulte Internet.. Et surtout, la réalité des joueurs de SAO, leur identité « réelle » basée sur une existence de 2 ans dans un jeu vidéo. Quid de la réalite ? Asuna perd peu à peu son identité, tandis que ses données se dissolvent dans la matrice.
Le traumatisme et les souvenirs sont discutés. Peut-on, doit-on guérir sans jeter le passé ? Quelle douleur est la vraie ? Quelle vie est la vraie ? La trajectoire de la saga continue de mêler intimement le réel analogique et l’existence virtuelle pour placer au même rang émotionnel les intelligences, qu’elles soient artificielles ou organiques.
Dans quel but me direz-vous ? Réponse dans la saison 3.
Saison 3 – Alicization
Bienvenue dans le projet Alicization. Kirito est invité à tester le « Soul Translator », une machine de réalité virtuelle nouvelle génération permettant d’importer des informations directement depuis l’« âme » de son utilisateur dans un monde virtuel. C’est alors qu’il se retrouve livré à lui-même dans un mystérieux univers appelé l’Underworld. Incapable de rejoindre le monde réel, il rencontre un jeune habitant du village de Rulid. En partant à l’aventure, ce duo se lance dans une périlleuse quête aux enjeux bien plus importants qu’ils ne pouvaient l’imaginer. Quels secrets cache l’Underworld ? Et que se trame-t-il donc dans la « réalité » ?
Arc I – Beginning
L’histoire démarre dans un autre monde, où Kirito semble n’avoir aucun lien avec son existence en tant que Kazuto Kirigaya (et donc le Kirito de l’Aincrad, Alfheim ou GGO). On comprend très vite qu’il est en immersion totale, en Full Dive plus avancé… Et plus complexe. À son réveil, il n’a aucun souvenir de sa plongée, et lorsqu’il est en plongée, aucun souvenir de sa vie « réelle ». Kirito-Underworld est ami avec Eugeo et Alice, il a passé son enfance avec eux et vit un drame : Alice est capturée pour avoir dépassé les bornes du territoire.
Kazuto Kirigaya travaille pour un projet d’Intelligence Artificiel auto-apprenante à portée socio-militaire du laboratoire Rath. Son « âme », sa personnalité sert un ensemble de calcul afin de faire grandir ALICE (anagramme pour Artificial Labile Intelligence Cybernated Existence) et sa population numérique. L’Underworld, l’envers du décor, ou l’autre côté du miroir (assumons-nous ici dans l’amalgame, Alice est blonde avec une tenue de petite servante bleue à peine subtile) semble grandir et évoluer plus vite, et connaît pour cheffe l’Administrator, une déesse magique qui a craqué les codes sources du programme et règne en despote.
Dans le monde réel, Kazuto et Asuna travaillent ensemble pour faire vivre Yui dans leur monde, jusqu’à ce qu’ils soient agressés par un membre du Laughin Coffin (encore eux !). Mortellement blessé, Kazuto est transporté sur l’île laboratoire de Rath et retourne en plongée dans l’Underworld pour préserver sa conscience. Cette fois, c’est bien Kirito-Aincrad qui est en Full Dive, avec d’étranges sensations de déjà-vu. Il y rencontre (à nouveau donc) Eugeo (mais lui ne se souvient pas de Kirito, vous suivez ?), qui est à la recherche d’Alice. Kirito, en sauveur potentiel qu’il est, décide de l’aider (espérant trouver dans le même temps un moyen de sortir d’ici) et leur aventure pour intégrer la plus haute caste de leur monde commence…
L’intérêt de cet arc repose sur le démantèlement d’un programme artificiel par ses propres intelligences, Kirito ne devient qu’un prétexte au monde, pas son explication. Certes il en est une solution, je dis une car il y aurait pu en avoir de multiples autres, par son recul et sa capacité à décoder l’univers. Il n’est ni omnipotent, ni omniscient, il est juste conscient de la structure et des règles de l’univers dans lequel il se trouve et comme d’habitude, Kirito vit intensément chaque aventure, comme chaque vie qu’il aurait pu avoir. L’apport du personnage de Eugeo comme reflet inversé de Kirito nous permet de discerner enfin une autre force efficace qui n’est ni celle de l’épéiste noir, ni celle de l’éclair mais celle d’une volonté et de ses dégâts dans un monde totalitaire. L’autre intérêt pour moi d’Alicization, c’est l’avancée spectaculaire des enjeux d’une IA dans la société moderne, et du positionnement au profit d’une humanisation totale du numérique. Des PNJ doués de volonté peuvent agir selon leurs codes sources… Où se situe dès lors la différence entre les décisions émotionnelles basées sur des contextes pour les êtres humains organiques, et les résultats basés sur des calculs complexes pour les IA ?
Arc II – The War of the Underworld
L’Administrator est morte, supprimée de l’Underworld. Condamnant Kirito à l’infirmité dans son sacrifice (un combat interne semble se dérouler, ou est-ce déjà la défaite pour lui ?) Au même-moment, rappelez-vous, sur la plate-forme de Rath, le conflit entre des mercenaires et l’équipe scientifique qu’Asuna a rejoint, continue de faire des dégâts, ils menacent de priver l’île d’électricité, et donc d’éteindre tout lien avec Kirito. Très vite, les mercenaires trouvent un moyen d’infiltrer l’Underworld de l’autre côté de la faille, dans le Dark Territory. Une nouvelle menace plane pour Alice et son peuple. Il faut retourner au combat, et les motivations du nouvel ennemi semble pointer dans sa direction.
Cette deuxième partie, plus dynamique que l’autre (oui, la première partie est … lente) nous ouvre une autre portion du récit. Avec ses stratèges et ses différentes factions. Cela faisait longtemps que les combats dans SAO n’avaient pas pris une dimension aussi intense et épique. Evidemment, pour eux, la guerre est réelle, et les enjeux tout aussi personnels que l’étaient les affrontements des autres arcs. On ne se bat pas pour se libérer d’une fiction ou d’un jeu mortel. Ici, c’est la guerre, avec des soldats et des ambitions d’honneur, de territoire. Ici, c’est pour de vrai, c’est leur existence toute entière qui est menacée. Autre différence notable, Kirito n’est pas du tout à son avantage, et je dois dire que cela fait du bien ! Il devient enfin l’enjeu et non le moyen, et la fin de la première partie de cet arc finit d’asseoir la théorie que l’on attendait depuis longtemps, l’inversion des rôles entre lui et Asuna/Alice/Sinon/Leafa…
La dernière partie a donc suscité une belle colère chez moi, l’arc 3 dure 23 épisodes, et je n’en ai trouvé l’intérêt que sur les 4 derniers, c’est vous dire. La série traîne en longueur, meublée par des scènes de fan-service quasi dérangeantes car gratuites et sans intérêt pour l’histoire. Les combats sont interminables de ressorts scénaristiques et torturent littéralement tous les personnages féminins… Kirito revient en héros parfait. C’est assez insupportable de voir une série s’auto-mutiler de la sorte. C’est la fin de l’arc qui finit par nous émouvoir. Avec l’enjeu du temps réel et du temps numérique. Kirito et Asuna décident de vivre 200 années virtuelles, ensemble, pour sauver l’IA et Rath. Cet enfermement volontaire vous tire une larme, admettons-le ici, car c’est le destin de ce duo de construire et de vivre dans un monde parallèle. Comme dans l’Aincrad, ils sont plus heureux ensemble dans le numérique, que séparés dans le réel. Une autre idée est amené au réveil de Kirito et Asuna, l’idée que le cerveau humain ne peut stocker 200 ans de mémoire, Kirito demande donc qu’on la lui enlève. Son existence numérique. Mais Higa décide de la conserver en copie. Dans le même temps, Kirito sombre dans la depression du deuil d’Eugeo, et de sa vie oubliée. Comme si la volonté héroïque de Kirito était restée dans cette copie. Celle-ci tourne d’ailleurs au vinaigre, car radicalisée par ses 200 années de souveraineté, elle s’affirme en protecteur de l’Underworld et anti-humanité… (Skynet es-tu là?). La saison se termine sur le retour d’Alice, Asuna et Kirito dans l’Underworld qui a beaucoup évolué, puisqu’il s’agit dorénavant d’une planète aux combats interstellaires… (Esthétique que nous n’avions pas encore eu dans l’univers d’SAO…) Nous avons droit à deux lignes de conclusion, amenant l’idée d’une énième saison de la saga, mais mettant un terme à cette aventure. (Je soupçonne la production d’avoir accéléré la création, ne laissant place qu’à des épisodes fan-services, reculant au maximum la diffusion de bonnes idées… Nous laissant un goût amer d’une série inachevée).
En Conclusion…
Sword Art Online est une aventure épique dans le monde de l’immersion virtuelle, de ses puissances et de ses limites. La grande force de la saga c’est son traitement des joueurs et du jeu en MMORPG de manière générale. Les joueurs sont décrits avec des profils exhaustifs, une pluralité des motivations et un traitement respectueux, bienveillant et critique, qui dénote d’une grande connaissance de la communauté. Je me demande parfois si Kayaba Akihiko n’est pas inspiré directement de Reki Kawahara… Oserai-je un jour l’interroger dessus ? Je profite de la conclusion pour saluer aussi la bande originale de la série par Yuki Kajiura qui a su créer des entités musicales pour Asuna, Kirito ainsi que pour les scènes primordiales de la série. La chanteuse LiSA a propulsé les opening et ending des derniers arcs à un tout autre niveau musical dans la pop japonaise. Pour moi, la saga complète est une mise en scène des interrogations des enjeux de l’immersion/de l’importation virtuelle dans un monde où tout va de plus en plus vite, où les frontières n’ont plus d’autres limites que celles de notre perception.
Il reste néanmoins des faiblesses à la série, dont une que l’Histoire ne lui pardonnera que de moins en moins, son sexisme. (Je n’ai pas parlé du « traditionnel » épisode à la plage, qui ouvre un débat, et un article en soi…) La série regorge de personnages féminins, certes, avec leurs propres facultés, personnalités, complexités et enjeux. Mais, soyons honnêtes, elles forment davantage un « harem » autour de Kirito qu’une réelle ambivalence paritaire. Là où Kirito semble posséder une force quasi invincible et une complexité rendu uniquement tangible par son mutisme… Asuna, Yui, Leafa, Sinon, Yuki, Alice proposent pourtant une vision réaliste car plurielle des qualités et défauts de ces personnages. Asuna est décrite par sa rapidité et sa force mais hélas aussi par sa seule relation amoureuse…
Yui est une IA à l’émotion enfantine et ses peurs sont réelles, mais elle n’est invoquée que majoritairement par Kirito. Leafa est indépendante, mais maladivement possessive. Sinon est d’une dextérité sans failles, malgré ses traumatismes qui la rendent méfiante, mais pas face à Kirito. Les arcs Mother’s Rosario et Alicization tentent petit à petit d’apporter une réelle évolution, Yuki est optimiste, déterminée, alors qu’elle est malade, Alice est bouffie d’orgueil et de remords, mais au fond d’elle-même ne s’en remet qu’à Kirito … Ce dernier disparaît néanmoins quasiment des récits pour mettre en avant des problématiques sociales qui ne lui sont pas attribuées, ou des forces qui le mettent (enfin!) à mal. On avance doucement mais sûrement !
Avec cette troisième saison « Alicization » diffusée sur Wakanim en simulcast, Sword Art Online touche malgré tout à son point d’intérêt : le traitement des existences et entités numériques lorsqu’elles émanent de l’humain pour ses intérêts…
https://www.youtube.com/watch?v=JEyvJivUFdw
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