Critique – Chicken Run : la menace nuggets


Vingt trois ans après le premier opus, Chicken Run : la menace nuggets, réalisé par Sam Fell (L’étrange pouvoir de Norman) et toujours produit par le légendaire studio d’animation en stop motion Aardman, agite le poulailler depuis son arrivée sur Netflix le 8 décembre dernier :

Après avoir réussi, à ses risques et périls, à fuir la ferme de Tweedy, Ginger a enfin réalisé son rêve : elle vit désormais sur une île paisible. Lorsque Rocky et elle donnent naissance à une petite Molly, Ginger est comblée de bonheur. Or, sur le continent, les poulets doivent affronter une nouvelle menace. Pour Ginger et son équipe, il n’y a pas une seconde à perdre : il faut tout faire pour sauver leurs congénères.

Reprendre cette histoire iconique menée par la rebelle Ginger nécessitait de les sortir de leur zone de confort, et pour cela les protagonistes se retrouvent comme des coqs en pâte, installés en autarcie sur leur île naturelle aménagée par leurs soins. La fière Ginger se retrouve confrontée aux désirs de liberté de sa fille Molly, et doit gérer les pics héroïque et égotique d’un Rocky en quête de reconnaissance dans le regard de sa fille. Le film prend le parti de canaliser cette échappée dans une vision positive de la famille, ce qui tranche avec les productions mainstream actuelles, dotées d’une gravité dramatique plus prononcée.

En dehors de la famille héroïque de Ginger, Babette, équipée de ses meilleures aiguilles à tricoter, représente à mon sens l’esprit même de Chicken Run. Elle garde toute sa fraicheur, sa gentillesse et son humour absurde. On a toujours autant envie de l’adopter !

Chicken Run : la menace nuggets reprend les codes du film de cambriolage à la sauce James Bond pour ce projet de libération des poulettes. Les rats sont de retour pour approvisionner ce plan de casse/évasion et le vieux colonel Fowler apporte de l’humour dans une scène d’anthologie impliquant une limace qui a envie de tout sauf d’être là. On retrouve la redoutable Mrs Tweedy en cheffe d’industrie du nugget, cette dernière utilisant les symboles du colonel Sanders pour vendre une utopie où les proies seraient heureuses d’être tuées et mangées.

A l’instar de Chonchon, le plus mignon des cochons, le discours autour de la consommation de viande et de sa remise en question se fait plus directe. L’imaginaire de Chicken Run est très populaire permettant ainsi d’articuler et de rendre accessible cette prise de position politique sur la question du veganisme souvent décriée par le grand public.

On ressent toute l’ambition du studio Aardman dans la création de décors impressionnants comme l’île refuge et la prison abattoir. L’île fourmille de verdures et d’habitations, tandis que le décor de la prison usine aborde une amplitude d’espace digne d’un repaire d’un vilain de James Bond, mais aussi une ludicité dans les environnements où évoluent les volailles captives. Les plans d’infiltration n’ont pas à rougir face à des blockbusters de type Mission Impossible.

Au niveau musical, Harry Gregson-Williams, habitué de l’univers du studio britannique (Souris City), prend le relais de la composition impactante originale à laquelle il avait contribué avec John Powell en y ajoutant des accents pop pour la caractérisation du personnage de Molly. On ressent ainsi la naïveté de la jeune héroïne et son regard sur le monde qu’il lui reste à découvrir. La partition se permet aussi des envolées jazzy pendant les séquences d’infiltration.

Chicken Run : la menace nuggets réussit son pari de revenir avec des positions plus affirmées que l’opus original, et apporte un sentiment réconfortant autour de la famille. Ce film d’animation est à déguster en toute décomplexion et sans se dire que c’était mieux avant. Si vous avez envie de faire une soirée consacrée à l’aventurière Ginger, vous pouvez parfaitement enchainer l’original et cette suite pour votre plus grand plaisir.

Les deux long métrages sont disponibles sur Netflix.


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