Critique – Le Robot Sauvage


Après un détour par la prise de vue réelle avec L’Appel de la Forêt, Chris Sanders revient à l’animation avec Le Robot Sauvage chez DreamWorks Animation, disponible actuellement en salles et dont nous vous avions parlé en milieu d’année.

Le Robot Sauvage suit l’incroyable épopée d’un robot – l’unité ROZZUM 7134 alias “Roz” – qui après avoir fait naufrage sur une île déserte doit apprendre à s’adapter à un environnement hostile en nouant petit à petit des relations avec les animaux de l’île. Elle finit par adopter le petit d’une oie, un oison, qui se retrouve orphelin.

Le Robot Sauvage s’ouvre sur l’arrivée chaotique de Roz dans une foret dense et imposante où elle n’est pas la bienvenue, ignorante des mécanismes naturels et incapable de communiquer. On se retrouve vite enveloppé par ces grands espaces et pris par la vie constante qui habite cette nature paraissant presque étrange, comme issue d’un autre monde. L’aspect pictural émulé par l’animation 3D s’inscrit dans la lignée de ce qui a été créé par DreamWorks depuis ses dernières années dans Les Croods 2 : Une Nouvelle Ère ou le Le Chat Potté 2 : La Dernière Quête et évoque ici les peintres paysagistes américains du XIXème siècle tels que Thomas Cole ou Frederich Edwin Church.

Adaptée de l’excellente œuvre de Peter Brown, l’histoire se concentre sur la construction de la relation aussi aléatoire que complexe entre Roz et l’oison Joli-Bec, qui nous emmène dans l’exploration d’une parentalité imparfaite mais authentique. Les moments les plus brutaux du livre ont été transformés en scènes de destruction impressionnantes et en pointes d’humour noir, permettant une soupape de décompression et laissant ainsi place à des concepts plus abstraits mais tout aussi sombres, plus cinématographiques que littéraires.

La recherche perpétuelle de mission et son obsolescence proche dû à une manque flagrant d’instinct de conservation cohabitent dans le corps et l’esprit métallique de Roz. Elle choisit une existence auprès des animaux de la forêt, en prenant le risque d’heurter le système même qui l’a programmée et conçue. Ces éléments agissent en parallèle de la découverte de sa propre histoire et de son identité par Joli-Bec, dont la mort d’existence ne dépend que d’elle, la poussant à aller bien au-delà de sa programmation de base. On pense au placide robot de guerre devenu jardinier dans Le Château dans le ciel mais aussi au destin du SecUnit de la saga de sciende-fiction Le Journal d’un AssaSynth de l’autrice Martha Wells dans cette volonté de s’affirmer en dehors d’un moule établi par une société du futur.

La présence tardive mais importante de l’antagoniste Vontra dans la narration,et un ajout par rapport à l’œuvre originale, apporte de l’ambiguïté par sa gestuelle chaleureuse et son côté tactile tentaculaire mais également une notion plus autoritaire du système qui régit ces êtres synthétiques, la présence de robots de combat sous ses ordres ne laissant pas beaucoup d’ambiguïté quant aux chances de Roz. A l’image de Chelsea dans Ruby, l’ado kraken, ce type de personnage pimente la narration et nourrit les conversations et l’évolution des protagonistes.

Dans cette adaptation, l’humanité n’est pas présente mais on comprend assez rapidement qu’elle s’est retirée dans une bulle, aussi physiquement que mentalement éloignée de toute vie sauvage comme celle qu nous est montrée. Ce choix permet de se concentrer sur la relation nature-machine qui s’établit tout au long du métrage. Il sera intéressant de voir comment les humains sont exploités dans la narration d’une suite du Robot Sauvage, déjà en développement chez DreamWorks avec la même équipe.

La musique, composée par Kris Bowers (Green Book, Inventing Anna), se révèle épique et orchestrale pour les moments de plongée dans la nature, et inscrit des motifs électroniques pour l’aspect technologique lié à la société du futur. Les morceaux originaux de Marren Morris et Billie Eilish s’inscrivent de façon fluide dans le déroulé de l’intrigue.

Grosse attente depuis la découverte des premières images au festival d’Annecy, Le Robot Sauvage a réussi à combler mes attentes, tant pour la réussite de l’adaptation du livre jeunesse que pour les émotions pures données à l’écran. Ce film signe la fin d’une époque chez DreamWorks Animation car il est le dernier à avoir été entièrement réalisé à Glendale, ce qui le rend encore plus précieux et à soutenir. Je vous encourage vivement à prendre vos tickets pour le découvrir en salles ou de réserver un moment dans les prochaines vacances qui arrivent pour apprécier cette soupape de décompression et cette ode bienvenue à la liberté .


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