Avec la sortie imminente de Mirai, ma petite soeur c’est l’occasion de revenir sur les œuvres de Mamoru Hosoda. Aujourd’hui, One Piece : Le baron Omatsuri et l’île aux secrets !
Si la filmographie de Mamoru Hosoda n’a réellement commencer à attirer les regards avec le succès d’Ame et Yuki, le réalisateur japonais a eu un début de carrière prolifique en tant qu’animateur avant de monter les échelons, passant par la réalisation de l’un des segments du long métrage Digimon dans les années 2000, avant de connaitre une impasse créative chez Ghibli où il a échoué à adapter en film Le Château Ambulant. Retournant dans l’univers du petit écran, Hosoda retente sa chance quelques années plus tard avec l’opportunité de diriger le sixième film de la saga One Piece. Titré Le baron Omatsuri et l’île aux secrets, ne jouissant pas d’une popularité folle chez les fans, l’objet réalisé par Hosoda et scénarisé par Masahiro Ito vaut le détour.
Si tu es un pirate parmi les pirates, rejoins l’équipage de Luffy pour une nouvelle aventure sur l’île de la fête ! L’équipage du chapeau de paille décide de s’offrir enfin un repos bien mérité. Direction l’île de la fête : plantureuses créatures, mets succulents, spa… Un vrai paradis pour les pirates ! Mais c’est sans compter sur le Baron Omatsuri, le propriétaire de l’île, qui leur annonce qu’avant de profiter des attractions, ils vont devoir passer des épreuves d’enfer. Laissant ses compagnons affronter les épreuves, Chopper fouille un peu plus l’île. Il y découvre rapidement quelques éléments troublants sur la véritable nature de cette île et de ses habitants. Quels sombres desseins le Baron Omatsuri trame-t-il dans le dos des pirates au chapeau de paille ? Luffy est-il seulement conscient de la situation dont il va devoir se dépêtrer ?
A moins d’avoir passé ce début de millénaire sur une île déserte, impossible de n’avoir jamais entendu parler de One Piece, que ce soit en manga (actuellement 91 volumes) ou en anime, dont la somme totale des épisodes va bientôt atteindre les 900 épisodes, sans compter les spéciaux et bientôt 14 films. Toutefois, nul besoin d’avoir une connaissance étendue pour profiter de l’histoire de ce baron Omatsuri et l’île secrète.
En effet, le film commence presque comme un filler de luxe, où notre équipage se laisse séduire par un message les invitant à prendre des vacances sur l’île du Baron Omatsuri, et c’est sur un générique à l’ambiance très calme que débute l’aventure, dont la réalisation dénote avec l’habituelle frénésie qui habite les épisodes que j’ai pu voir de la série. Le scénario de Masahiro Ito fait la part belle au mystère et laisse vivre les personnages dans la grande tradition shonen, mais c’est clairement la mise en scène travaillant avec finesse les détails et laisse filtrer une atmosphère de douce étrangeté qui montre déjà le goût du réalisateur pour les simulacres et les mondes cachés.
Derrière les façades colorées et le public copié collé de l’île des fêtards, c’est un mystère rampant qui finit par contaminer la trame de départ, quelque part entre le prisonnier et l’île mystérieuse, où nos héros sont mis à l’épreuve d’une manière que l’on voit peu dans ce type de spectacle. On y retrouve bien sûr le principe de sacrifice, de confrontation finale et de la force de l’amitié, mais leur traitement ici est plus intime grâce à la présence d’une famille pirate dont le père fait semblant d’être un gros dur et l’ancien capitaine d’un équipage décimé par le Baron et qui tente d’avertir Luffy du danger qui guette.
Des signes avant-coureurs d’autant plus efficaces dans leur distillation qu’ils se font entre des séquences d’épreuves et de courses poursuites à l’animation irréprochable et au découpage souvent hilarant. une compétence technique que l’on retrouve à tout les niveaux, les décors laissant une énorme impression et la lumière crépusculaire de certaines séquences contrastent avec celles qui les précédent, très lumineuses et à la limite de l’artificiel, toujours au service de cette histoire de menace insidieuse sous les défis stupides du Baron.
Le film a également le mérite de durement mettre à l’épreuve Luffy, le capitaine du Chapeau de Paille, éternel optimiste et dont la confiance en ses amis en prend un sacré coup, respectant une rythmique filmique qui veut que le héros touche le fond avant l’acte final, ce qui se produit ici avec une certaine violence qui vient à faire douter le spectateur que les personnages puissent réellement s’en sortir.
Le personnage même du Baron et son équipage maudit, qui vivent un rêve éveillé digne de l’intrigue de Zelda – Link’s Awakening, et de sa fleur ressemblant à s’y méprendre à un motif de l’artiste Takashi Murakami, sont d’un tragique auxquels il est facile de s’identifier mais aux débouchés complètement inhumains, une constante thématique très présente dans les histoire de One Piece.
Équipé d’une réalisation technique béton qui prouve les compétences d’Hosoda en tant que chef de poste sur un format long, One Piece : Le baron Omatsuri et l’île aux secrets, bien qu’issu d’un milieu moins personnel que les films qui suivront, possède déjà de manière coincidentale certains germes et idées de fond. En contrepartie, la forme est déjà bien présente, les personnage étant ici esthétiquement réappropriés par rapport à la série ou aux autres films, ce que des fans lui ont reproché, alors même que c’est le principe de ce style de film de s’émanciper de la série pour proposer un autre type de spectacle !
Édité par Kazé en France quelques sept années après sa sortie cinéma japonaise, One Piece : Le baron Omatsuri et l’île aux secrets vaut d’être vu ou revu pour sa particularité en tant que film One Piece tout autant que comme exercice de style complètement maîtrisé de la part d’un cinéaste prêt a se révéler avec son film suivant, à la manière d’un Miyazaki sur Le Château de Cagliostro.