Critique – New Gods : Nezha Reborn


Montré en WIP lors du précédent Festival International du Film d’animation d’Annecy, New Gods : Nezha Reborn a su éveiller les appétits de Netflix puisque la plate-forme a acheté les droits quasi internationaux du film produit par Light Chaser Animation après sa sortie en salles chinoises le 12 février et une place honorable au box-office dans des circonstances loin d’être favorables. C’est donc à la maison que le métrage peut être apprécié, ce qui est bien dommage vu les 1h50 de spectacle proposées.

Fan de course automobile, Li Yunxiang est un livreur banal… jusqu’à ce qu’il recroise de vieux ennemis et doive découvrir les pouvoirs de Nezha, dont il est la réincarnation, afin de protéger ses proches.

Le succès du personnage classique qu’est Nezha, arrivé dans le mouvement de celui de la résurgences des nombreux films mettant en scène Sun Wukong le Roi Signe, n’a rien de très surprenant étant donné l’appétence du public chinois pour ce qui est tiré de La Pérégrination vers l’Ouest, d’autant plus que le personnage fut l’une des figures culturelles populaires à jouir d’une faveur officielle en Chine durant les années 1960 et 70. Le succès massif de Nezha en 2018 a enfoncé le clou et Light Chaser Animation, qui a passé plusieurs années à développer leur propre version, est désormais disponible.

Contrairement à la production de Chengdu Coco Cartoon et bien que basé comme lui sur L’Investiture des dieux, le New Gods : Nezha Reborn de Ji Zhao prend le parti de jouer sur le principe des réincarnations pour proposer une histoire se déroulant 3000 ans plus tard et donc détachée du film en costumes traditionnels comme l’était par exemple son précédent, White Snake. A ce titre, les quatre ans de production du film se voient sur l’écran : la ville de Donghai et son mélange d’esthétiques urbaines des débuts du XXème siècle sont un délice visuel.

Tout comme dans Oscar et le monde des Chats, les premières vingt minutes de Nezha Reborn sont d’un rythme soutenu où sont présentés tous les personnages mais aussi le contexte de cette ville et les rapports de pouvoir entre les habitants et les clans dirigeants de Donghai, qui ont la mainmise sur une eau potable raréfiée. Après des séquences de courses poursuites effrénées, la confrontation avec Ao Bing sera l’incident déclencheur de l’intrigue principale. L’entourage de Li, bien qu’au départ plutôt archétypal, va souffrir le martyr pour faire émerger l’étincelle d’héroïsme du fameux Nezha, dont la colère enflammée difficile à maîtriser sera l’enjeu principal du film qui, pour ne pas perdre en vitalité, garde une vitesse hallucinante dans son déroulé.

Guidé par un homme mystérieux au masque de singe et dont l’animation est proprement fantastique, Li va devoir canaliser sa colère pour affronter le clan De lors de multiples combats à la mise en scène intense mais aux chorégraphies toujours claires. Le montage de New Gods : Nezha Reborn reste toujours exemplaire et démontre la progression continue de l’expertise de Light Chaser Animation quant à la puissance cinématique soutenant la narration. Hélas, comme d’autres films chinois, le nombre de péripéties qui rythment le film est très élevé et peut facilement épuiser un public moins habitué à ce type de frénésie.

Comme souvent dans ce type de films, c’est l’angle de la romance, ici complètement sous-traité, qui est le plus faible. Reléguée en arrière-plan pour soutenir un brin le parcours de souffrance du héros, Su Junchu est littéralement un médecin dont les vaines tentatives de sauver les proches de Li seront autant de raisons de leur rapprochement, créant un triangle amoureux plus que basique entre elle et l’amie d’enfance de Li, Kasha, qui échappe de peu au vent de mort entourant le héros et dont le rôle dans l’histoire est souvent passif : on notera tout de même un moment crucial de l’intrigue, lorsqu’elle accuse un personnage secondaire dont elle a été la victime et où elle est de suite crue par tous !

Vous l’aurez compris, les personnages féminins ne sont pas vraiment à l’honneur dans Nezha Reborn, auquel on peut largement préférer White Snake, et ce n’est pas le seul autre personnage féminin qui changera réellement la donne dans la succession de combats que Li doit mener pour vaincre le clan De. Bien qu’armé d’un climax satisfaisant, les dix dernières minutes établissent d’autres enjeux puisque manquent à notre Nezha ressuscité un bon nombre de ses armes, et la confirmation de l’identité de l’homme masqué amène de bien belles suppositions.

Avec deux scènes à la moitié du générique, Nezha Reborn se pose comme le premier jalon en grande majorité enthousiasmant d’un univers filmique très pop et flashy. Reste qu’à l’image des courses motorisées, un meilleur équilibre entre les enjeux personnels et les thématiques abordées ne seraient pas du luxe, et permettraient au film de respirer un peu mieux, une vision continue demandant une grande concentration vu l’intensité déployée sur l’écran. Cela va sans dire qu’une séance au cinéma aurait été bien rentabilisée !

Nezha Reborn, disponible depuis le 12 avril sur Netflix.


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