Critique – Cigognes et Compagnie


Entrevu et délicieusement vendu par son producteur Brad Lewis à Annecy lors d’un Focus Studio dont certaines séquences m’avaient fait rire jusqu’à en avoir les larmes aux yeux, Storks ou, en France, Cigognes et Compagnie, possède dès le départ un double fardeau : celui de succéder à La Grande Aventure Lego, premier film du Warner Animation Group (ou WAG) et celui d’être le premier concept original développé par ce département constitué à la fois de cinéastes venus du live et de professionnels de l’animation. Du coup, le postulat est très, très simple, comme voici :

Pendant longtemps, les cigognes livraient les bébés. Désormais, elles acheminent des colis pour le géant de livraison par Internet – Cornerstore.com. Junior, coursier star de l’entreprise, s’apprête à être promu. Mais la Machine à Fabriquer les Bébés est accidentellement activée sous sa garde… et produit une adorable petite fille, en totale infraction avec la loi ! Avec l’aide de son amie Tulip, seul être humain sur le Mont Cigogne, Junior se précipite pour effectuer sa toute première livraison de bébé. Le temps presse car son patron ne tardera pas à apprendre la nouvelle… Junior pourra-t-il redonner aux cigognes la vraie mission qui est la leur ?

Aaaaah, Sony Pictures Imageworks, souvenez-vous ! Il n’y pas si longtemps, à l’occasion de la sortie cinéma d’un étron qui arrive sous nos latitudes en vidéo très prochainement, j’avais parlé des mésaventures de cette compagnie, réduite à accepter la sous-traitance extérieure tant Sony Pictures Animation a du mal à lancer de nouveaux projets.

Et bien ce sont eux que l’on retrouve aux commandes de l’animation de ce long-métrage, ici supervisée par le vétéran Doug Sweetland, tandis que Nicholas Stoller (Yes Man, Nos Chers Voisins1 et 2) s’est attelé au script et à la direction de l’improvisation de ses comédiens en cabine d’enregistrement.

Un procédé plutôt atypique qui a obligé de nombreuses réécritures puisqu’à chaque passage des comédiens, c’est une grosse partie du script qui était réécrit au rythme de leurs nouvelles idées et gags créés sur le tas, donnant aux scènes de dialogues du long-métrage une vibrance inhabituelle, puisque c’est traditionnellement à cet endroit que ce type de film comique faiblit.

Avec comme résultat immédiat l’absence de temps mort et une émotion bien palpable qui habite les interactions entre Tulipe et Junior, tout comme un côté frontal et concret de leur dialogues lorsque les confrontations éclatent. Les personnages sont certes loin d’être des modèles de profondeur, mais leur personnalité vivent et laissent une marque distinctive, un gros plus pour que l’on s’attache à eux en dehors des multiples courses-poursuites qu’il subissent..

Si les moins de 10 ans passeront au travers des thématiques essentiellement tournées vers les adultes (tout ce qui évoque la parentalité est pertinent en plus d’être drôle), ils auront tout de même un spectacle très plaisant, car on sent qu’à cet endroit les équipes de Sony Pictures Imageworks soutenues par la direction de Sweetland, se sont fait très plaisir, avec un aspect cartoon plus que bienvenu, toutefois différent du squash & stretch extrême dont nous avait abreuvé les Tempête de Boulettes Géantes et Hotel Transylvanie. Depuis une amorce qui ne dépasse pas le quart d’heure, Cigognes et Compagnie décolle et ne faiblit plus, enchaînant des péripéties hilarantes tout de même bien moins frénétiques que dans La Grande Aventure Lego.

Après la franche déconvenue que fut le doublage français de La Grande Aventure Lego, il était utile de revenir sur celui de ce nouveau long-métrage, et il est clair que Warner Bros France a relevé la barre. Certes, nous sommes toujours encombrés par un casting de star qui sert en partie à faire gagner de la visibilité du film, mais force est de constater que Florent Peyre et Bérengère Krief se sortent très honorablement de l’exercice, l’expérience du stand-up devant aider. Ils sont parfaitement secondés par l’indéboulonnable Richard Darbois et une mention spéciale pour Issa Doumbia dont les intonations snobs valent tous les relous de la planète.

Avec tout ça, vous allez croire que je vais me convertir à la version française, ce qui ne se produira jamais, mais Cigognes et Compagnie, au-delà de ce point précis (et souvent débattu), possède des faiblesses. Dans son esthétique principalement, car hormis les très beaux décors conçus par Paul Lasaine, une partie du character design de Sylvain Deboissy (Turbo, Drôles de Dindes, Les Rois de la Glisse) est assez peu inspiré du côté des humains (encore moins à la vue des designs recalés d’Annette Marnat pour Tulipe, qui n’a gardé que sa fabuleuse tignasse rousse) et les animaux tirent quant à eux leur épingle du jeu avec des loups qui en sont le point culminant.

Il n’empêche, tous sont délicieusement animés et les mouvements de Tulipe emportent la timbale : de mémoire, je n’avais jamais vu une fille bouger comme ça dans un film d’animation mainstream depuis le premier Tempête de Boulettes Géantes ! La meute de loups réservent aussi quelques belles surprises et constitue le haut du panier du métrage en ce qui concerne les gags visuels, même si d’autres séquences font bien le travail, comme le combat silencieux.

Niveau silence d’ailleurs, le film se permet de ne pas être trop bruyant, et la musique originale de Mychael et Jeff Danna (Le Voyage d’Arlo) et ne sont entrecoupées « que » de quatre chansons, dont celle de Jason Derulo et une version tordante de Handclap, ânnonée par Pigeon Lerelou.

Au final, cette deuxième tentative du WAG montre que le  collectif possède une certaine vitalité, meêm si elle reste à confirmer pour les films originaux. Pour ça, il faudra tout d’abord affronter un mur de briques danoises en 2017 avec Lego Batman – Le Film en mars et Ninjago en fin d’année ! D’ici là, je vous invite à faire l’impasse sur les Trolls de DreamWorks et à vous laisser porter par ces cigognes. Le film n’invente pas le fil à couper le beurre, mais remplit très bien sa fonction de divertissement…et c’est tout ce qu’on lui demandait. Les vacances de la Toussaint approchent… choisissez judicieusement ! https://www.youtube.com/watch?v=T0F-rHP4rfs


A lire dans le même genre

Dernières publications

  • Critique – Transformers : Le Commencement

    Critique – Transformers : Le Commencement

    L’ubiquité de la franchise Transformers est indiscutable : un raz de marée de jouets depuis 1984 généré par Hasbro et renforcé par de nombreuses séries animées à la télévision, sept longs métrages en prise de vues réelles au cinéma depuis 2007 et pourtant, jusqu’ici, un seul film d’animation sorti au cinéma ? C’était il y…

  • Aardman animera le retour de « Pingu »

    Aardman animera le retour de « Pingu »

    Après une série d’animation en 3D faite au Japon par Dandelion animation, Pingu et son légendaire « Noot noot » reviennent à la source avec l’annonce d’une nouvelle série en stop motion, cette fois-ci au studio britannique Aardman (qui s’y connait assez bien en animaux, silencieux ou non). « Chez Aardman, nous adorons collaborer avec des propriétés…

  • Critique – Le Robot Sauvage

    Critique – Le Robot Sauvage

    Après un détour par la prise de vue réelle avec L’Appel de la Forêt, Chris Sanders revient à l’animation avec Le Robot Sauvage chez DreamWorks Animation, disponible actuellement en salles et dont nous vous avions parlé en milieu d’année. Le Robot Sauvage suit l’incroyable épopée d’un robot – l’unité ROZZUM 7134 alias “Roz” – qui…