Une première bande annonce pour « Ruby, l’ado Kraken »


Dix ans après Les Croods, Kirk DeMicco (Vivo) est de retour à DreamWorks Animation avec Ruby, l’ado Kraken. J’ai eu l’occasion d’échanger avec le réalisateur et la productrice du film Kelly Cooney Cilella (Bilby, Trolls 2 – Tournée Mondiale) au sujet de ce nouveau long-métrage coréalisé avec Faryn Pearl.

Âgée de 16 ans, Ruby Gillman est aussi maladroite qu’adorable. Elle tente désespérément de trouver sa place au lycée d’Oceanside, où elle a l’impression d’être totalement transparente. Elle donne des cours de soutien en maths à un jeune skater dont elle est secrètement amoureuse, mais qui ne semble admirer chez elle que sa capacité à résoudre des équations. Et de toute façon, elle ne peut pas fréquenter les élèves les plus intéressants du lycée, car sa mère qui la surprotège lui a formellement interdit de se baigner dans l’océan. Mais le jour où elle lui désobéit et brise cette règle d’or, elle découvre qu’elle est la descendante directe de la lignée des reines guerrières Kraken, et qu’elle est destinée à monter sur le trône jusque-là occupé par sa grand-mère : la reine guerrière des Sept mers.

La bande annonce nous pose le décor mythologique d’un affrontement millénaire entre les krakens et les sirènes sur fond d’ambiance lycéenne. La jeune Ruby, camouflée dans le monde des humains, va devoir gérer ses envies d’expérimentations adolescentes et la pression familiale au sujet du sort de l’océan, menacé par les sirènes. On ressent une volonté d’aller au-delà des clichés des deux espèces mythologiques avec cette grosse incursion dans le teen movie.

Il est intéressant de noter que ce film peut permettre une percée vers le public adolescent accompagné de leurs parents, eux-même nourris à ces références de films lycéens.

Muriel : J’ai vu la bande-annonce ce matin et c’était très inspirant sur les films pour adolescents. Comme cette ambiance de ce type de films de la fin des années 90, du début des années 2000, les références sur les créatures mythologiques s’intègrent très bien dans cet univers.

Kirk DeMicco et Kelly Cooney Cilella : Merci !

Muriel : Alors, ma première question était de savoir comment vous êtes-vous rencontrés sur ce projet, comment avez-vous travaillé ensemble ?

Kelly Cooney Cilella : Bien sûr. J’avais déjà travaillé avec Kirk quand il réalisait le premier film des Croods. Alors que je développais Ruby, l’ado Kraken chez DreamWorks, lorsqu’est venu le temps de trouver un réalisateur, je savais que nous avions besoin de quelqu’un qui pourrait livrer une comédie avec du cœur et de l’action épique. Nous avons donc demandé à Kirk de venir nous rejoindre, ce qu’il a fait et ce fut génial de travailler avec lui depuis son retour.

Muriel : Donc, dans la bande annonce on peut voir une forte rivalité entre Ruby et la sirène. Comment avez-vous travaillé sur ces personnages féminins forts et comment avez-vous brisé les stéréotypes d’opposés, entre la fille nerd et la reine du bal ?

Kelly Cooney Cilella : Oui bien sûr, nous avons adoré l’idée de retourner cette idée reçue quant à ce que vous attendez d’une sirène. Vous savez, les contes de fées nous ont dit que ce sont ces créatures merveilleuses et nous avons pensé qu’il serait amusant de retourner cela et d’en faire, en gros, la méchante fille venue de la mer. Il y a tant de comique à tirer de ça, d’avoir cette méchante fille, la fille populaire qui débarque à l’école et à laquelle Ruby se heurte.

Parce que Ruby est un peu maladroite, peu sûre d’elle, aime ses amis mais cache un profond secret. Donc quoi de mieux pour la confronter que quelqu’un qui est juste pleine d’effervescence et avenante alors que tout ce que Ruby ​​peut faire de son côté est de se cacher… Nous avons senti que ce serait une dynamique vraiment amusante sur laquelle jouer.

Ruby Kraken

Muriel : Était-ce facile pour vous de mélanger cet univers plutôt fantastique avec celui du lycée ?

Kirk DeMicco : C’était en fait l’une des choses amusantes que ce contraste. On peut dire qu’il n’y a probablement pas de terrain plus minés, plus dangereux que le lycée pour Ruby, alors qu’en parallèle il y a une véritable guerre entre sirènes et krakens au fond de l’océan. C’est l’écart qui est amusant derrière cette idée : à savoir qu’elle doit apprendre à naviguer à la fois dans ces deux univers et que l’océan est celui dont elle a été privée à cause de sa mère et des règles qu’elle a forcé sur elle.

Elle n’était pas autorisée à aller dans l’océan avant le début de ce film et nous apprenons pourquoi, parce que Ruby a ce grand pouvoir en elle. Mais c’est une enfant à qui on a dit de le cacher et elle l’a protégé et ce pouvoir est quelque chose avec laquelle elle doit devenir entière, qu’elle doit partager avec le monde.

Donc, pour revenir à ces personnages féminins dans cette histoire, ils sont nombreux, contrairement à de nombreux autres films, et ça m’a intrigué en tant que parent d’une fille de neuf ans. Nous avons ici trois générations d’une histoire mère-fille avec une grand-mère, une mère et une fille, auxquelles nous pouvons ajouter deux autres personnages : Margot, la meilleure amie de Ruby et notre antagoniste sirène, ce qui fait monter le compte à cinq personnages féminins forts.

La quête pour Ruby est que toutes ces femmes dans sa vie ont la volonté qu’elle agisse. Elles veulent toutes profondément qu’elle entre en action, respectivement pour de bonnes ou de mauvaises raisons, mais l’important est que Ruby, durant le film, doit découvrir ce qu’elle-même veut faire. Elle doit choisir son chemin et sa vie. Donc, lui donner l’opportunité de rencontrer d’autres personnages forts comme elle rend cette décision plus difficile mais aussi plus gratifiante lorsqu’elle choisit finalement sa propre voie.

Ruby Kraken

Muriel : Oui, elle n’est nulle part chez elle, que ce soit sur terre et sous les mers.

Kelly Cooney Cilella : Tout à fait.

Muriel : J’aime beaucoup le contraste entre le lycée et sous l’océan, qui possède des couleurs fluo très chatoyantes qui tranchent avec celles du lycée, avec des couleurs plus pastels et nuancées.

Kirk DeMicco : Notre grand chef décorateur Pierre Olivier Vincent, qui a aussi travaillé sur la trilogie Dragons, a ce merveilleux principe d’unifier le design général de Ruby, l’ado Kraken en reproduisant ces formes sinueuses inspirées de l’esthétique de nos personnages, tandis que vous avez découvert la palette de couleurs qui caractérise ces deux mondes, tout du moins ceux que vous voyez dans la bande-annonce.

Il y a beaucoup plus de visuels à découvrir mais en regard de ce contraste, sachez que nous avons également poussé celui-ci dans les styles d’animation. Notre superviseur de l’animation, Carlos Fernandez Puertolas, voulait pousser cette courbure, entre celle du monde des créatures marines et celle de la famille Gillman, avec dans ce cas-là, l’animation la plus « courbe » revenant au style d’animation de Ruby. Ses mouvements sont bien plus élastiques que ceux, moins souples et plus structurés, des vrais humains qu’elle fréquente. Il y a donc ce contraste présent en permanence, à la fois dans le visuel et dans le style d’animation, que nous avons poussé et sur lequel nous jouons constamment.

Muriel : Je vais parler de la relation entre les personnages qui m’a rappelé certains teen movies comme Lolita malgré moi ou Easy A pour l’aspect réputation du lycée.

Kirk DeMicco : Oui, peut-être que je me trompe mais vous avez tapé très près. Lolita malgré moi a été sujet à conversation, nous avons aussi parlé de Teen Wolf, de Seize Bougies pour Sam, de American Girls et mmmh, je ne me souviens plus du titre exact, c’est quoi celui où la fille saute de la voiture avec la fille en rouge, Booksmart peut-être ?

Kelly Cooney Cilella : Non, pas Booksmart, même si on a parlé de livres… Lady Bird.

Kirk DeMicco : Lady Bird, désolé merci. Il y a tout un ensemble de films, oui.

Muriel : Parlons maintenant du casting de voix…

Kelly Cooney Cilella : Notre personnage principal Ruby est donc interprété par Lana Condor, qui est surtout connue pour avoir joué dans une série de films Netflix titrée A tous les garçons que j’ai aimé et elle est fantastique. Elle a vraiment travaillé avec nous pour développer le personnage de Ruby et elle possède une idiosyncrasie qui correspond très bien au comportement de la fille intelligente, très intelligente mais un peu maladroite et stressée : par exemple, elle commence à parler rapidement quand elle est vraiment nerveuse et c’était très amusant de travailler avec elle en termes de développement de ce personnage, ça nous a vraiment inspiré à écrire pour elle et à jouer avec ses atouts.

Et puis avec Annie Murphy en tant que sirène maléfique, vous savez, elle était un sujet d’admiration grâce à son jeu dans Schitt’s Creek et Annie a cette capacité – je pense que c’est que nous avons aimé ceci dans sa performance dans cette série – de jouer ce genre de fille populaire qui est légèrement égocentrique. Et pourtant, malgré ça, vous l’aimez tout de même et je pense qu’une grande partie de cet effet est dû au fait qu’Annie Murphy est Annie Murphy. Elle est si charmante et s’est tellement amusée à jouer avec Chelsea, son personnage et à jouer cette duplicité d’être une adolescente mais également cette sirène maléfique. Elle fut vraiment douée pour jouer cette dualité qui la caractérise.

Kirk DeMicco : A propos des autres personnages féminins, nous avons la légende vivante qu’est Jane Fonda en tant que grand-mère qui est cette puissante reine de l’océan qui fut séparée de sa petite-fille. Lorsqu’elle la rencontre, vous savez, elle veut lui confier ce monde, lui donner toutes ces choses mais cela vient avec une grande responsabilité et d’un autre côté se trouve la mère de Ruby, Agatha, jouée par Toni Collette. Agatha est une femme qui a fui sur la terre ferme pour protéger sa fille du monde sous-marin et de ses querelles. Elle s’est fait une vie pour elle-même, elle est une incroyable agente immobilière et elle subvient aux besoins de son foyer.

C’est une femme qui protège férocement sa famille et elle a le cœur à la bonne place à tout moment, mais elle a créé une situation où elle claustre sa fille d’une manière qui ne favorise pas son bien-être. Si Agatha pouvait voir la situation de l’extérieur, elle comprendrait qu’elle doit laisser Ruby trouver son chemin mais vous comprenez pourquoi cette maman protège son enfant et elle espère que viendra un moment où elle pourra tout lui expliquer. Mais ce moment, elle ne l’a pas encore trouvé.

Ruby faisant ce qu’elle fait au début de Ruby, l’ado Kraken, et se lance elle-même dans cette aventure découvre le retard que sa mère doit rattraper pendant qu’elle grandit en puissance et en force, mettant en branle cette dynamique entre elles, une dynamique générationnelle entre la grand-mère, Agatha et Ruby et cette maman qui se retrouve tiraillée entre ces forces qui s’imposent dans sa vie.

Muriel : Les personnages traversent de nombreuses émotions de la taille d’un kaiju, qui sont difficiles à appréhender. Comment avez-vous écrit ces personnage et les réactions à ces sentiments ?

Kirk DeMicco : Et bien c’est une bonne remarque. La bonne chose pour cette enfant, c’est que c’est une métaphore externe qui reflète la transformation interne de Ruby et ce qu’elle traverse. Lorsque nous rencontrons Ruby pour la première fois, elle est une fille qui brûle d’envie de dire à quelqu’un son secret, qu’elle est sous couverture depuis sa naissance et qu’elle agit, parle, marche comme une humaine et qu’elle toujours dû être comme ça.

Toute l’histoire tend à ce qu’elle finisse par trouver ce lieu sûr en espérant qu’elle pourra enfin être libre et partager avec ses amis et son monde qui elle est vraiment, tout en découvrant vraiment qui elle décide de devenir. Une chose qu’elle ignore au début du film. C’était donc une opportunité de traiter de la croissance de notre héroïne, un élément sur lequel nous avons gardé un œil et sur lequel nous avons beaucoup échangé avec Lana.

Ruby, l’ado Kraken est une histoire de passage à l’âge adulte, une histoire de maturité où on parle de cet enfant qui fait de son mieux et qui finit par se heurter à sa mère et pourtant, à la toute fin, c’est en fait elle qui va rassembler cette famille. Sa famille qui ne se parle plus, d’où l’importance que la maturité fasse également partie de l’histoire, tout comme apprendre de ses pouvoirs comme une potentielle fêlure, elle en apprend davantage sur elle-même.

Muriel : C’est la fin de l’interview donc j’ai hâte de voir le film en entier et de vous voir en personne, peut-être au prochain festival d’Annecy ?

Kirk DeMicco et Kelly Cooney Cilella : Oui, ce serait super !

Muriel : Merci à vous.

Également au casting de Ruby, l’ado Kraken, Colman Domingo sera le père de Ruby, Sam Richardson son oncle et Blue Chapman son petit frère, et aussi Will Forte et Nicole Byer. Liza Koshy, Ramona Young, Eduardo Franco et Echo Kellum.

Le film sort le 28 juin dans les salles françaises via Universal Pictures France.

Un grand merci à Florence Débarbat et à l’équipe Universal France pour l’organisation de cette interview


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